► Désert et oasis

SOMMAIRE

Ce qu'il dit de lui-même

Ce que dit de lui Jean Malaurie

Ce que dit de lui Bruce Chatwin

Ce qu'il dit de Monfreid

Le désert des déserts

Bibliographie

 

 

Retour à Wilfred Thesiger

al Auf

al Auf

auf2.jpg (1805 octets)

Salim ibn Kabina

auf3.jpg (1926 octets)

Salim ibn Ghabaisha

 

 

"Ces hommes étaient très gais et pleins de vie. Le pâturage était bon ; leurs chameaux, dont plusieurs étaient en train de donner du lait, seraient bientôt gras. Selon leurs critères, la vie serait facile cette année, mais, ce soir, ils dormiraient nus sur le sable glacé avec pour seule couverture leur pauvre pagne. Certaines années, al Auf me l'avait raconté le matin même, les hommes épuisés retournaient aux puits, pour parler de leurs lèvres noircies et ensanglantées de la désolation du désert, du vide que j'avais vu sur la route en venant de Muqshin; il y avait des années où les dernières plantes desséchées avaient disparu et où hommes et animaux, véritables squelettes ambulants, tombaient et mouraient. Je pensai aux puits amers dans la fournaise de l'été quand heure après heure, inexorablement, les hommes faisaient boire leurs chameaux assoiffés et insistants, jusqu'à ce que les puits finissent par s'assécher alors que les bêtes gémissantes persistaient à réclamer une eau inexistante. Je pensai à la rigueur terrible de la vie des Bédouins sur ces terres épuisantes, à leur courage, à leur endurance. Le lait qu'ils nous donnèrent à la tombée du jour était réconfortant, contrairement à l'eau amère qui nous avait râpé la gorge. Le matin, ils nous remirent une petite outre remplie de lait à emporter... Nos hôtes nous souhaitèrent d'aller en paix et nous les confiâmes à Dieu. Il n'y avait plus d'arabes devant nous jusqu'à notre arrivée à Dhafrah."

"J'étais heureux en compagnie de ces hommes qui avaient choisi de m'accompagner ; j'éprouvais de l'affection pour leur personne et de la sympathie pour leur mode de vie. J'étais satisfait de l'aisance de leur relations mais je n'imaginais nullement pouvoir être l'un des leurs. J'étais néanmoins leur compagnon et un lien inviolable nous unissait, aussi sacré que le lien entre l'hôte et l'invité, transcendant la loyauté à la tribu et à la famille. J'étais leur compagnon de route et, pour me défendre, ils se battraient même contre les membres de leur propre tribu ; ils en attendraient autant de moi. Mais je savais que pour moi l'épreuve la plus difficile serait de vivre en harmonie et de maîtriser mon impatience ; de ne pas me replier sur moi-même ni critiquer des critères et des modes de vie différents des miens."