 "Dieu t'a
placé sur ma route", me dit-il. "J'aurai désormais tout ce qu'il me
faut." Je l'aimais déjà beaucoup. Attentif et gai, il me rendait la vie plus
facile, en prévenant mes moindres désirs. Son amitié donna une note personnelle à ma
vie dans le désert ; jusqu'alors, elle l'était assez peu"
"Âgé d'environ seize ans, il mesurait à peu
près 1 m 65. Dégingandé, il marchait à grandes enjambées, penché en avant, un peu à
la manière des chameaux. Ce qui est fort rare. Les bédouins font de petits pas et se
tiennent très droits. La pauvreté et les épreuves l'avaient marqué : très maigre, les
joues creuses. Ses longs cheveux lui tombaient sans cesse dans les yeux, quand il faisait
la cuisine ou quoi que ce soit d'autre. Il les rejetait en arrière d'un geste impatient
de la main. Il avait le front plutôt bas, de grands yeux, un nez droit, des pommettes
saillantes et une grande bouche à la lèvre supérieure allongée. Son menton,
délicatement dessiné et plutôt pointu, était barré d'une longue cicatrice, marque
laissée par un fer rouge qu'on lui avait appliqué dans son enfance pour le soigner de
quelque maladie. Il ne cessait de découvrir ses dents, d'une blancheur éclatante, car il
riait et parlait constamment. Son père était mort deux ans auparavant, et c'était au
jeune bin Kabina qu'était incombée la tâche de subvenir aux besoins de sa mère, de son
jeune frère et de sa sur, encore un bébé. Je l'avais rencontré à un moment
critique de sa vie, comme je le découvris une semaine plus tard."
Le Désert des Déserts
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