"En Sibérie, dès la première neige, la vie s'éveille..."

"Ivan Ivanovich, une fois, fut surpris..."

"Avec eux aussi, nous échangeâmes, Fayme et moi, des cadeaux..."

 

Le village oublié

 

Le village oublié

"Après quelques virages, la route aboutit à un sentier étroit, lequel conduit à une poterne basse et massive ; la porte close est munie de solides armatures de fer.

Je m'approche avec précaution : rien ne bouge autour de moi ; la piste reste déserte, les buissons muets ; seules les mésanges voltigent joyeusement de branche en branche ; le sol mou est recouvert d'un épais tapis de mousse.

- Ohé...! criais-je.

Comme lancé par une bonde, quatre hommes, surgissant sur le mur de terre, se dressent devant moi.

- Des Huns!... murmurais-je spontanément.

De taille moyenne, ils ont de longs cheveux noirs qu'ils portent en tresses, des visages jaunes, les yeux bridés ; ils sont vêtus de vareuses et de pantalons de toile, leurs pieds sont entourés de chiffons et chaussés de légères sandales de cuir. Ils tiennent à la main un javelot, un arc et un carquois avec des flèches.

Je lève les bras en l'air, fais des signes avec mon fusil et mes bras tout en avançant lentement au-devant d'eux. Les hommes, ramassés sur eux-mêmes, restent figés dans la position où ils me sont apparus.

Ai-je donc devant moi, dans cette forêt vierge, les représentants d'une civilisation vieille de plusieurs siècles?

En quelques enjambées, j'arrive à côté d'eux et je reste debout, moi aussi ; nous nous examinons avec une curiosité anxieuse ; de part et d'autre on est dans l'attente de l'inévitable.

Tout à coup un nagan aboie par deux fois derrière moi ; à peu d'intervalle les coups de feu se répercutent dans la forêt comme le tonnerre. Deux formes humaines qui se tenaient sur la voûte dominant le mur de terre s'abattent sur le sol où elles restent sans mouvement ; je n'avais pas remarqué qu'ils m'avaient visé avec leurs arcs ; les quatre autres se jettent à terre et restent couchés comme s'ils étaient morts eux-mêmes. Derrière moi, c'est Ivan Ivanovitch qui a tiré. (...)

Je secoue les sauvages qui font entendre un gémissement semblable à celui d'un petit chien. Pleins de terreur, ils relèvent la tête et restent pliés sur les genoux, murmurant des paroles que je ne comprends pas."